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Quel est le rôle de l'enseignant ?

L'attitude d'un enseignant face à la suspicion d'un cas de maltraitance

Chaque professionnel qui suspecte un cas de maltraitance doit mettre tout en œuvre pour faire cesser la maltraitance et protéger durablement l’enfant. La loi impose en effet à chacun de venir en aide à une personne exposée à un péril grave : LES ARTICLES 422 bis et 422 ter DU CODE PENAL PUNISSENT CELUI QUI S’ABSTIENT DE VENIR EN AIDE A UNE PERSONNE EXPOSEE A UN PERIL GRAVE (non-assistance à personne en danger).

Il est important de préciser qu'il ne s’agit pas d'une obligation de dénonciation aux autorités judiciaires, mais bien de venir en aide, c'est à dire de prendre les mesures de secours les plus adéquates, par exemple en faisant appel aux services spécialisés.

1. Recevoir la parole de l’enfant

Les premières réactions sont importantes pour l’enfant. Si celui-ci se sent bien écouté et soutenu au moment de ses confidences, il en retirera une force pour tenir bon si, par la suite, sa parole est mise en doute.
L’adulte qui recueille les confidences de l’enfant ne doit pas mettre en doute ce qu’il entend.
Il ne doit pas se laisser guider par une curiosité spontanée qui risque de transformer les propos de l’enfant.

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2. Les difficultés de l’enseignant

La personne qui recueille les confidences peut être assaillie par diverses réactions difficilement contrôlables :

  • colère vis-à-vis des personnes soupçonnées de maltraitance ;
  • rejet irréfléchi de la possibilité d’une maltraitance si l’on connaît et apprécie les éventuels auteurs ;
  • sentiment d'impuissance suite à la découverte fortuite d’une possibilité de maltraitance grave chez un enfant dont on s’occupe dans l’exercice de sa profession ;
  • peur d’une mauvaise interprétation personnelle de la situation ;
  • peur de troubler gravement la vie familiale de l'enfant ;
  • crainte de laisser l'enfant dans une situation à haut risque ;
  • peur des conséquences sur sa vie personnelle...

Il importe d’envisager la suspicion d’un cas de maltraitance en restant calme et maître de soi.

Deux écueils extrêmes sont à éviter : premièrement, le déni des faits ("c'est impensable") ; deuxièmement, l'intervention «Zorro» ou « Robin des Bois» (des enseignants, sensibilisés par ce problème, ont l'œil et l'oreille ouverts et peuvent se sentir investis du devoir de venir en aide à l’enfant seul et contre tous).

La meilleure attitude est, vous l'imaginez, à mi-chemin entre ces deux extrêmes.

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3. Les impératifs à respecter lorsqu'on suspecte une maltraitance

Sauf en cas de danger grave et immédiat pour l’enfant, surtout quand il est petit, il est nécessaire d’éviter de prévenir la police ou le procureur du Roi. Cette démarche risque en effet de judiciariser rapidement la situation, avec éventuellement des sanctions pénales, alors que des structures d’aide spécifiques existent dans chaque arrondissement judiciaire.

Une règle de nécessité absolue fait loi : ne pas divulguer à n’importe qui le secret de l’enfant.

Une caractéristique des enfants en difficultés consiste à se confier à des personnes issues de leur entourage et chez qui ils perçoivent la possibilité d’être écoutés confidentiellement. Suite au respect du secret de l’enfant, la collaboration avec les instances compétentes a plus de chances d’aboutir à ce que l’enfant souhaite le plus : ne plus être maltraité, mais surtout garder ses parents. Le secret ne peut être partagé qu'avec une personne qui peut aider à solutionner les problèmes rencontrés par l'enfant. Cette personne étant elle-même tenue au secret.

Il convient donc, absolument, de ne pas ébruiter les inquiétudes auprès des collègues ou, pire encore, auprès d’autres parents. Pourtant, il est important de ne pas rester seul face à la prise en charge d’une situation de maltraitance. Le risque d'erreur est trop grand et les conséquences sérieuses. Il est nécessaire que l'enseignant gère au mieux sa part du travail et puisse ensuite passer le relais à une personne compétente pour poursuivre l'aide à l'enfant.

Quelques conseils judicieux face à l’enfant :

Si l'enfant se livre à des confidences inquiétantes :

  • l’écouter avec empathie ;
  • ne pas questionner l'enfant de manière excessive ;
  • ne rien suggérer ;
  • assurer à l’enfant que le secret sera gardé, mais qu'on ne peut l'aider seul, et donc l’avertir qu’on demandera de l’aide à quelqu’un de confiance ;
  • noter avec soin les phrases exactes prononcées en prenant bien garde d'être le plus fidèle possible au vocabulaire employé ;
  • noter la date, l'heure, le lieu où ces confidences ont eu lieu ;
  • signer ce document, le garder précieusement et en sécurité, hors de portée de toute indiscrétion.

Que faire pratiquement lorsque des inquiétudes subsistent ?

  • se rappeler que presque tous les symptômes observés peuvent correspondre à des causes très diverses et pas seulement être dus à des maltraitances ;
  • en parler en privé et en demandant le secret au directeur de l'établissement ;
  • en accord avec la direction (sauf situation très grave ou à haut risque de représailles sur l'enfant), faire part aux parents des inquiétudes concernant leur enfant, et ce en privé, sans orienter vers la maltraitance éventuelle ni répéter les propos de l'enfant (risque de représailles pour l'enfant) ;
  • consigner par écrit les symptômes jugés inquiétants et les dates des démarches faites.

Si les inquiétudes persistent, il s’avère alors nécessaire de demander de l'aide en fonction de la situation de maltraitance :

  • signes de négligence (maigreur, saleté, absence de collations et de vêtements adaptés, fatigue chronique) : on peut contacter le centre PMS ou PSE, ou directement demander un avis à une équipe SOS Enfants ;
  • maltraitance sexuelle entre enfants à l'école : PMS ;
  • absentéisme scolaire : PMS ;
  • absentéisme scolaire malgré l'action du PMS : SAJ ou médiateur scolaire ;
  • découverte d'hématomes suspects (par exemple, autour du cou, dans le dos...) ou d'une fracture avec révélations de l'enfant : contacter le PSE puis prévenir les parents en accord avec le directeur de l'école. Si les symptômes sont sérieux et l'enfant inquiet de rentrer à la maison, le conduire à un service d'urgence pédiatrique et/ou contacter une équipe SOS Enfants ou le SAJ. Il pourra ainsi être hospitalisé et donc protégé le temps du bilan ;
  • révélations d'un abus sexuel intrafamilial : service d'urgence d'un hôpital ou équipe SOS Enfants ou permanence du SAJ afin que l'enfant ou l'adolescent puisse être protégé du bouleversement familial que va provoquer ses révélations (le centre PMS peut vous y accompagner). Souvent l'enfant n'imagine pas les conséquences de ses révélations sur la famille et quand il en prend conscience, il se rétracte pour protéger ceux qu'il aime ;
  • comportements hypersexualisés qui peuvent parfois faire suspecter un abus sexuel : ne pas brusquer les choses, avertir le PMS qui verra probablement l'enfant ou prendra contact avec une équipe SOS Enfants pour faire un bilan de la situation ;
  • flagrant délit de maltraitance et danger grave et immédiat pour l'enfant : police ou hôpital. Des policiers sont actuellement formés pour interroger avec tact et respect les enfants en audition vidéo filmée (ce qui permet de ne pas répéter des interrogatoires à chaque étape de l'enquête).

Le premier interlocuteur d'un enseignant est, après en avoir parlé avec le directeur de l'établissement, un membre du PMS et/ou du PSE. Ceux-ci, après analyse de la situation, interpelleront l'une des structures spécialisées que nous allons vous décrire par la suite.

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4. Rencontrer les parents

La direction de l’école peut convoquer les parents dès qu’elle est assurée que l’enfant est en sécurité. L’entretien avec les parents doit être préparé. A la clôture de l'entretien, il est important que le/la directeur/trice précise aux parents que le rôle de l'école n'est pas de mener une enquête mais qu'il est de sa responsabilité de veiller au bon développement des enfants. L'équipe scolaire va poursuivre sa mission d'enseignement et orienter la famille vers des services appropriés pour les aider à dépasser leurs difficultés.

Il est important de :

  • rencontrer les parents dans un lieu calme où la confidentialité est garantie, en dehors de la présence de l’enfant ;
  • être à l’écoute des parents ;
  • éviter de juger, d’accuser ou de faire avouer les parents ;
  • éviter de rapporter les confidences directes de l’enfant à ses parents.

Le directeur et l’enseignant doivent faire part aux parents de leurs inquiétudes en évoquant leurs observations les plus complètes et les plus objectives possibles plutôt que les dires de l’enfant.
Face à un refus de collaborer et/ou une attitude très agressive des parents à l'égard de l'enseignant ou du directeur, le rôle du directeur, aidé éventuellement par un agent PMS, est de signaler aux parents que son devoir est d'informer les autorités compétentes (SAJ ou Parquet) qui évalueront l'état de danger dans lequel est l'enfant et les mesures d'aide à mettre en place avec eux.


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